Répondre à une interview

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Dans ses relations avec les médias, une autrice ou un auteur de romans va vraisemblablement, tôt ou tard, être soumis à une interview, qu’il l’ait sollicitée ou non par le biais d’un communiqué de presse. Comme toutes les interactions médiatiques, il s’agit d’un exercice qui mérite qu’on s’y prépare un minimum.

Et pour commencer, ayons les idées claires au sujet des définitions, ça ne peut pas faire de mal. Le mot « interview » renvoie à deux réalités distinctes, que l’on a tendance à confondre.

Pour commencer, il s’agit d’une technique qui consiste à obtenir des informations en posant des questions à un individu. Cette méthode peut être utilisée dans un contexte médiatique : une bonne partie du travail journalistique consiste à recueillir des réponses en posant des questions à des personnes bien informées, et à se servir des infos recueillies pour rédiger des articles, des brèves, des analyses, des témoignages, des portraits, et bien d’autres formes encore. Mais l’interview existe dans un cadre bien plus large : un entretien d’embauche, par exemple, n’est rien d’autre qu’une interview qui porte sur les capacités professionnelles et la motivation d’un candidat à un poste de travail.

La seconde définition du mot « interview » désigne spécifiquement une forme journalistique, qui consiste à présenter sous forme de questions-réponses les informations recueillies par le biais de la technique décrite ci-dessus. L’ambiguïté du terme fait que ce n’est pas parce qu’un journaliste vous interviewe qu’il va publier le résultat de votre entretien sous la forme d’une interview. Et puis il existe également des interviews en direct, auxquelles je vais consacrer un prochain billet.

Mais ici, j’aborde une question utile pour les auteurs, dans leurs relations avec les médias : comment se passe une interview avec un journaliste, qu’en attend-il, comment vous y préparer et que va-t-il advenir de vos réponses ?

Vous ne devriez avoir aucune peine à trouver des réponses

Au fond, pour celle ou celui qui répond aux questions, « interview » est un bien grand mot pour une conversation. Que ce soit face-à-face, par téléphone, ou même par messagerie, par mail ou par vidéoconférence, le journaliste qui vous a contacté va vous poser une série de questions, et vous allez y répondre. Dans certains cas, cela peut prendre pas mal de temps. Les rédacteurs de la presse écrite, en particulier, aiment bien accumuler beaucoup plus d’informations que nécessaire. Si on ne vous en informe pas, demandez combien de temps vous devez prévoir, et aménagez votre agenda en conséquence.

Comme l’entretien porte sur des sujets que vous connaissez par cœur – vous et votre roman – vous ne devriez avoir aucune peine à trouver des réponses. Ce sera le cas pour tout ce qui est factuel – comment s’appelle votre livre, de quoi il parle, ce qui vous a motivé à vous lancer dans l’écriture, etc… – mais attendez-vous également à des questions plus déconcertantes, concernant votre ressenti, ou la signification profonde de votre démarche. Là, parfois vous aurez la réponse, parfois non, et ce n’est pas grave. Le journaliste vous pose ces questions pour ajouter un aspect émotionnel à son papier, pour l’humaniser : il part à la pêche, et ne s’attend pas à ce que ça morde à tous les coups. Ne soyez donc pas désarçonné si les mots vous manquent.

N’hésitez pas à demander ce que le journaliste compte faire de votre entretien. Parfois, il sera publié sous la forme d’une interview, en discours direct ou rapporté. Parfois, les informations recueillies serviront simplement à alimenter un article sur votre livre, voire une critique, ou même simplement une petite brève. Souvent, on pourra vous renseigner assez précisément sur la forme et sur la longueur de l’article prévu, ainsi que sur la date de parution (ou de diffusion). Parfois, cependant, le journaliste n’a pas d’idée précise en tête, et attend vos réponses pour savoir quelle est la meilleure manière de s’en servir.

Quel que soit le résultat, attendez-vous à ce que la grande majorité de votre propos ne figure pas dans l’article ou le sujet produit. Une partie du travail rédactionnel consiste à résumer, à condenser, ce qui peut être frustrant pour vous si vous avez passé deux heures à répondre à des questions pour alimenter un sujet de deux paragraphes. Dans le cas d’une interview radio ou télévisée, il est possible que vous soyez enregistré pendant un quart d’heure et que le seul extrait utilisé au final dure quinze secondes. C’est le jeu. Dites-vous que vos réponses auront permis d’alimenter le reste du sujet et d’en assurer la qualité ; que vous vous adressez, à travers les médias, à un public qui ne vous connaît pas du tout, et que toute information constitue un progrès pour vous ; enfin, il s’agit d’une prise de contact, qui peut déboucher sur d’autres sujets à l’avenir.

Plus longues seront vos réponses, plus elles seront raccourcies

Cela signifie aussi que plus longues seront vos réponses, plus elles seront raccourcies, résumées, montées par le journaliste. Faut-il alors opter pour la brièveté, et vous contenter de répondre à coups de slogans de vingt secondes ? C’est le choix de nombreux politiciens, qui s’arrangent ainsi pour que leur message rentre dans les formats resserrés des médias, en subissant les moins d’altérations possible. Cela peut aussi être le vôtre. Encore qu’un sujet consacré à la littérature soit, par nature, moins sensible qu’un reportage sur le budget d’une collectivité publique, cela ne vous empêche pas de choisir vous aussi une approche ciblée. Le risque, si vous n’avez pas été entraîné pour ça, c’est que vos mini-réponses préparées à l’avance ne soient pas très vivantes, et donc pas intéressante pour le public. Il est également possible qu’à vouloir résumer, vous omettiez vous-mêmes des informations intéressantes. Donc au fond, tout dépend du rapport de confiance que vous parvenez à tisser avec le journaliste.

Si, à la fin de l’entretien, un aspect qui vous parait crucial n’a pas été abordé, ou pas suffisamment, n’hésitez pas à le mentionner : il peut s’agir d’un oubli – rappelez-vous que le journaliste n’a pas la vision d’ensemble que vous avez. La plupart du temps, on vous sera reconnaissant de ce complément, même si cela ne garantit en rien que l’information en question figure dans la version finale de l’article.

De même, il peut arriver que vous soyez recontactés par le journaliste après l’interview. Au moment de rédiger, celui-ci peut réaliser qu’il lui manque une information, ou qu’il a mal compris quelque chose, et va donc vous réclamer quelques précisions.

Si vous avez des questions sur ce sujet, j’y répondrai avec plaisir. Comme je l’ai mentionné, je suis journaliste et auteur, j’ai été des deux côtés de la barrière, et je suis donc à même d’apporter un éclairage et de vous fournir des astuces.

14 réflexions sur “Répondre à une interview

  1. Merci pour cet article. Même si je n’en suis pas encore à être interviewée par des journalistes 🙂 Mais je me dis que le jour où ça sera le cas il faudra peut-être que je travaille un peu l’exercice. Parce que d’emblée j’ai tendance à vouloir être très précise dans mes réponses et donc très longue 😮

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  2. Merci pour ce retour de pro. Je pense que ce sont des précisions importantes pour les auteurs qui vont devoir faire face à un « questionneur » (quel qu’il soit).

    Tu as raison de préciser que tout ce qui est dit ne sera pas forcément réutilisé, d’autant plus si le journaliste à un sujet précis à traiter.
    J’ai eu la chance d’être interviewé en tant qu’auteur auto-édité par une grande chaîne TV.
    J’ai essayé de placer un maximum d’info sur mon livre (sachant que je serais filmé, je me suis même imprimé un t-shirt avec le QR code qui renvoyait vers ma page ^^), mais le sujet étant l’auto-édition, le bouquin n’est pas vraiment ressorti dans le reportage final (le t-shirt non plus d’ailleurs).

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  7. Encore un article très intéressant, que j’ai relu avec une attention particulière ce soir. Je serai en effet prochainement interviewé par un média suisse (pour le site RTS culture) et je m’interroge par rapport au format proposé. L’interview ne sera pas en direct, il est prévu une session d’enregistrement de 1h30. Ça me semble très long… aurai-je le souffle pour tenir cette distance ? Je suppose qu’il est prévu plusieurs pauses… je n’ai jamais fait d’exercice similaire. Je sais aussi qu’il ne ressortira qu’entre 15 et 30 minutes au final. Aurais-tu des conseils à prodiguer ? Je ne sais pas comment je peux me préparer. Est-il courant de disposer de quelques questions à l’avance ?

    Après avoir écouté quelques interviews de cette émission, j’ai l’impression que le journaliste improvise ses questions en fonction des réponses de l’auteur. Mais il semble également très bien connaitre le livre. J’ai aussi l’impression que la durée des réponses de l’auteur n’est pas bridée, il n’y a aucune interruption du journaliste. L’auteur est libre de monologuer pendant plusieurs minutes. Les questions du journalistes sont également très longues. Ça me semble être particulier comme format, peut-être plus détendu que celui du direct qui doit, je suppose, rentrer dans une case précise en termes de durée.
    Merci pour tes conseils.

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    • Bonjour Laurent !
      Le format que tu décris est très confortable et très avantageux. Je ne peux que te suggérer d’en profiter, tout en réalisant à quel point tout cela est exceptionnel. Une heure et demie d’enregistrement, c’est très agréable, ça va te permettre essentiellement de répondre aussi longtemps que tu le souhaites à toutes les questions que l’on te pose. Et un résultat final entre 15-30 minutes (pas de « que », c’est énorme !), devrait permettre à la personne qui réalise le montage d’en conserver les morceaux essentiels. Pour peu qu’il y ait une relation de confiance entre le journaliste et toi, tu devrais pouvoir te permettre d’y aller en toute détente, sans préparation particulière.

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